Le griffon de Gryphe, coloré dans un exemplaire des Colloques d'Erasme de 1536, du fonds de la Bibliothèque Diderot à Lyon.
Pour compléter ma modeste étude sur les marques d’imprimeurs,
une autre petite bestiole hiérocéphale dont cet autre blogueur (lien) avait déjà
évoqué la fréquence d’emploi chez les imprimeurs humanistes…
Petit détours, en ces congés de la Toussaint par Angers
où j’ai découvert – pour occuper les enfants – le musée du Génie et son
parcours très didactique. Au milieu des attributs de sapeurs et autres
démineurs, tout à côté des éclairages sur les talents de Vauban, était présenté
ce livre. Un cours de mathématiques intéressant les artilleurs comme les
stratèges bâtisseurs qui, et c’est bien là leur vocation, parent l’intelligence
des premiers. C’est évidemment pour sa marque que j’en ai volé une image…
Ici,
c’est aussi l’adresse qui m’intéresse en ce qu’elle illustre ce que j’évoquais
sur la description des lieux avant qu’on invente les numéros de voie. Celle-ci
est particulièrement développée. Il faut considérer un tissu urbain sans doute
plus dense qu’en plein XVIè siècle et qui force des descriptions de
plus en plus fournies en détails. De quoi presser la dotation des numéros qui
n'allait pas tarder alors. Là, le griffon témoigne aussi de l’adresse du
libraire, "à l'enseigne de -".
Je revenais donc sur ses jolies marques souvent
allégoriques qui ornent les pages de titre des éditions humanistiques. On en
trouve un peu au-delà mais passés les derniers sursauts de la Renaissance – dans
les champs du livre – après les deux ou trois premières décades du XVIIè
siècle, les frontispices gravés hors-texte ou des ornements fleuris plus standards
les remplacent souvent. Viendront ensuite des monogrammes et autres logotypes,
mais aux âges modernes.
Donc, disais-je, je vous renvoyais sur un article de
Bibliomab qui recensait quelques utilisations du fameux griffon au-delà – ou en
marge – de la marque du grand imprimeur lyonnais Sébastien Gryphe. Celui-ci l’avait vraisemblablement choisi pour l’analogie
avec son propre nom. En effet, à s’y pencher de plus près, l’animal chimérique
ne peut pas se vanter des mêmes exploits que le phénix, par exemple, ou encore
de nombreux autres oiseaux, bien réels, auxquels on associera telle noble vertu.
Le griffon est costaud, certes. Il a un petit talent pour la recherche et la
protection de l’or. Autrement, c’est pas folichon. Mais la fortune, c’est déjà
pas mal et puis la bébête est réputée fidèle et dévouée…
La marque lyonnaise « originelle », soient : un griffon, un globe ailé pour la Fortune et un « cube » pour la Constance. Ici, le parallélépipède évoque le livre. Le plus souvent, il n’est le produit que de ses seuls attributs géométriques. La devise, en français : « La vertu pour guide, la chance pour compagne. »
Ici, on voit la marque première de Marnef associé à la veuve de Guillaume Cavellat (à droite) et cette autre marque qui clôt l’ouvrage (à gauche) ; en l’occurrence, c’est le troisième tome des Histoires prodigieuses, extraictes de plusieurs fameux autheurs, grecs & latins, sacrez & prophanes, livre suivi d’un quatrième tome et relié ensemble a posteriori, le tout imprimé entre 1575 et 1580. Un livre en vente en ce moment sur la toile…
On relèvera que ce bois (celui de gauche) est original, tourné à droite avec une subtile nuance dans la devise que ne manqueront pas d'apprécier les plus fins latinistes...
Jérôme de Marnef, plus
jeune, est néanmoins quasi contemporain de son homologue lyonnais. Lui,
utilise à Paris la marque du pélican en raison de l’enseigne de son échoppe. En
marge du disgracieux piscivore, sa devise est la suivante : En moy la
mort, en moy la vie. Aussi aurait-il pu convoquer le phénix que d’autres
imprimeurs ont choisi. Pourtant, c’est le griffon qu’il presse en clôture de
ses éditions. Et celui-là même qui identifie Gryphe.
Comme le blogueur cité en dressait une liste déjà
large, on retrouve encore le griffon, dans une figuration moins majestueuse,
chez Claude Baaleu, lui aussi imprimeur au Mont Saint-Hilaire, nouvelle
appellation du quartier du Clos-Bruneau, proche la Rue
Saint-Jacques à Paris. Cet imprimeur, moins connu, reprenait la marque
d’un prédécesseur ; la bestiole n’est peut-être là que comme marqueur de
l’adresse…
Ici, dans les Œuvres de Varron commentées par Scaliger.
Je vous laisse poursuivre l’enquête. Et si vous voulez revenir à l’article précédent : c’est par là…
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